CMA : agir sur la décarbonation d’abord, affiner la data ensuite
Par Mehdi Arhab | Le | Environnement
Le Club des managers achats a été l’occasion pour une vingtaine de responsables et directeurs achats d’évoquer un sujet épineux : celui de la récolte et du traitement des données pour établir son bilan carbone. Compte-rendu, non exhaustif bien entendu.
La mesure de l’empreinte carbone est une science encore (très) imparfaite. Toutefois, elle semble progresser chaque année, toujours un peu plus. Et il faut avouer que c’est une excellente nouvelle. Il est néanmoins probable que les chiffres que l’on tenait pour correct hier ne soient plus jugés sérieux demain. Mais l’important est avant tout d’inscrire au plus vite ses fournisseurs sur une trajectoire de progrès ; peu importe le chiffre et la qualité supposée ou réelle de la donnée.
Il est difficile de se référer à des standards et de les appliquer, puisqu’ils n’existent pas
Depuis la mise en œuvre des premiers bilans carbone, les entreprises qui se sont lancés dans cet exercice (périlleux) se sont toutes senties, à un moment ou un autre, seules. Les difficultés durant la phase de collecte des données nécessaires au calcul de leurs émissions de gaz à effet de serre sont nombreuses. Les données à récolter sont tout autant nombreuses et elles sont tout autant à devoir être traitées. De plus, elles proviennent de sources diverses et les niveaux de fiabilité, eux, diffèrent grandement. « Peu de choses sont partagées sur le sujet. Lorsque l’on se compare aux autres, on remarque bien vite que les pratiques diffèrent. Il est difficile de se référer à des standards et de les appliquer, puisqu’ils n’existent pas », regrette le directeur achats d’une startup industrielle.
Pour s’en sortir, les entreprises doivent trouver un modèle organisationnel robuste afin de collecter les données de la meilleure façon qui soit. Or, le sujet est spécifique et propre à chacune des entreprises qui se lancent dans ce jeu d’équilibriste. Le processus de collecte des données est en plus de cela extrêmement long. « Nous avons mis deux ans pour collecter et, ensuite, être plus ou moins certain de la qualité de nos données », explique l’un des convives.
Une donnée exacte pour commencer à agir … ou pas
Pour certains, il est plus qu’essentiel de disposer de datas robustes et « correctes » pour agir. Il est à leur yeux inutile de se jeter à corps perdu dans des plans d’actions et définition de trajectoire sans s’appuyer sur quoi que ce soit. « Il faut disposer de données exactes pour agir et définir des objectifs réalistes et atteignables », assure l’une des convives. Un autre lui emboîte le pas. « Pour agir, il faut avoir des données fiables. Sans cela, il ne sert à rien de mener des actions sans base solide ». En somme, pour eux une longue phase de cadrage et d’analyse en amont est plus que nécessaire . Pour mener à bien un projet bilan carbone, il est nécessaire de connaître profondément le fonctionnement de l’entreprise et de son écosystème fournisseurs. Voilà qui n’a franchement rien d’évident quand on se penche sur la question.
Ne pas en avoir, ou du moins d’une qualité certaine, n’empêche en rien d’agir
« Une donnée correcte existe-t-elle vraiment ? » rappellent de nombreux invités autour de la table. Le sujet est central, les pratiques et manières de l’appréhender nombreuses. « Ne pas en avoir, ou du moins d’une qualité certaine, n’empêche en rien d’agir », défend l’un des invités. Mais pour que cet exercice paraisse moins difficile à réaliser et se fixer (réellement) des objectifs, il est important, en premier lieu, de réaliser son choix méthodologique. Comme l’ont évoqué de nombreux directeurs et directrices achats présents, la quantité de données à collecter est telle qu’il faut s’organiser en conséquence. Et cela est plus que nécessaire pour déterminer de façon fiable ses principaux postes d’émission carbone.
Concentrer ses efforts sur les points critiques
Mesurer précisément l’empreinte carbone de tous ses achats est une véritable gageure. Il est donc impératif de savoir quels achats sont les plus générateurs de carbone pour approfondir le calcul au bon niveau. L’une des convives explique que pour démarrer, elle a fait le choix de cibler ses catégories d’achats les plus émissifs, et souvent, ses fournisseurs les plus importants, pour lancer des actions ciblées. Mais là encore, vient la question de la qualité de la donnée ; et, par définition, une donnée n’a de sens que si elle est exploitable.
Entre les approches monétaire, physique, spécifique ou alors sectorielle, le choix est multiple. Toutes ont des avantages et des inconvénients. Elles ont moins le mérite de vous donner une base. Mais pour mener ce travail titanesque, faut-il encore avoir des outils solides et parvenir à faire le lien entre les différents spécialistes du bilan carbone et vos autres outils SI achats, notamment le SRM pour la gestion de la performance et des plans de progrès fournisseurs. Sans oublier, bien sûr, l’e-sourcing pour pondérer les offres en mettant le prix d’une solution en balance avec son empreinte carbone.