Carole Largeot : « Dans une boîte comme Contentsquare, les acheteurs font bien plus que des achats »
Par Mehdi Arhab | Le | Direction ha
Contentsquare, entreprise spécialisée dans l’analyse des comportements des internautes pour améliorer l’expérience utilisateur des sites web, a été l’une des premières startups/scale-up de la French Tech a structurer sa fonction achats. Celle qui est devenue l’une des licornes les plus en vue du pays avait nommé, au cours de l’année 2021, Carole Largeot au poste créé de directrice des achats groupe. Cette dernière revient sur les enjeux qui ont animé sa prise de fonction et nous décrit les prochains défis que les Achats devront relever.
Vous avez été recrutée en septembre 2021 par Contentsquare pour structurer sa fonction achats. Quelles étaient ses motivations ?
Nous sommes passés d’une logique décentralisée des Achats à une organisation centralisée.
Nous avons créé le service achats quand Contentsquare est passée de startup à scale-up de plus de 1 000 collaborateurs. Nous avons acquis sept entreprises ces quatre dernières années et avons ouvert de nombreux bureaux à l’international, en Asie, en Europe comme aux Etats-Unis. Ces changements importants devaient être reflétés dans nos opérations, dans une logique d’efficacité et de maîtrise des coûts. Nous sommes passés d’une logique décentralisée des Achats à une organisation centralisée.
Comment votre feuille de route répond aux objectifs qui vous ont été fixés ?
Comme dans toute organisation qui grandit vite, des silos se créent. Les Achats doivent les dépasser et créer des ponts pour apporter de la transversalité. La première étape a ainsi été d’établir une cartographie de toutes les dépenses faites au sein de l’entreprise pour avoir une vision complète et identifier les opportunités de synergies.
Nous avons établi des processus d’achats end-to-end, en collaboration étroite avec la Finance, et avons lancé un appel d’offres pour digitaliser ces processus et répondre à nos enjeux prioritaires que sont la scalabilité, la transversalité, et l’efficacité.
Ensuite, nous avons établi des processus d’achats end-to-end, en collaboration étroite avec la Finance, et avons lancé un appel d’offres pour digitaliser ces processus et répondre à nos enjeux prioritaires que sont la scalabilité, la transversalité, et l’efficacité.
Nous avons sélectionné un module édité par Ivalua, sur la partie PtoP, et dont la première phase de déploiement est prévue pour novembre. Nous allons onboarder 200 utilisateurs, puis en formerons davantage en fonction des besoins. À terme, le module doit nous permettre de mieux contrôler et comptabiliser nos dépenses engagées autour de workflows d’approbation automatisés, mieux gérer le volume de transactions et la comptabilisation des factures fournisseurs.
De quelle façon avez-vous organisé la direction des achats ?
J’ai été la première recrutée, je suis donc partie d’une feuille blanche. Nous sommes cinq personnes dans l’équipe, et sommes organisés par catégories de dépenses. Nous comptons trois category managers ; le premier administre les achats IT, qui englobent software, hardware et l’hébergement ; le second gère le périmètre achats prestations marketing et prestations intellectuelles ; le troisième pilote les achats liés à nos bureaux et à la vie de l’entreprise (déplacements professionnels, prestations RH, formations, événements internes). Le dernier collaborateur travaille sur l’excellence opérationnelle et pilote des projets transverses pour lesquels les Achats sont contributeurs. Il s’assure également de la bonne mise en place et de la solidité de nos processus, veille à les améliorer et à ce que les outils mis à disposition soient fonctionnels.
Les Achats sont rattachés à la direction des opérations, ce qui n’est pas courant, mais qui tend à se développer dans d’autres boîtes tech.
Quels ont été les bénéfices de ce rattachement hiérarchique ?
Pour réellement accompagner la croissance de l‘entreprise et créer l’adhésion des équipes métiers, il était essentiel de faire partie des usages, et donc de comprendre la culture
Pour les Achats, le risque est d’être réduit à une fonction administrative et de “cost killer”. Or, pour réellement accompagner la croissance de l‘entreprise et créer l’adhésion des équipes métiers, il était essentiel de faire partie des usages, et donc de comprendre la culture. Le rattachement à la direction des opérations a contribué à positionner les Achats au bon niveau, celui de partenaire business. En effet, le COO qui est présent depuis les débuts de Contentsquare, a été d’un grand soutien pour incuber cette nouvelle fonction et pour m’aider à avoir une bonne lecture de l’organisation et des enjeux. Depuis, les collaborateurs nous décrivent souvent comme un hub et un facilitateur qui assure une meilleure coordination des projets achats et la gestion des risques associés.
Quelles qualités recherchez-vous chez un acheteur ?
L’agilité me semble la compétence la plus importante, surtout dans une aventure comme celle de Contentsquare. Chacun à son échelle est entrepreneur, construit son terrain de jeu, affine et adapte sa roadmap au fil du temps et ne campe jamais sur ses positions.
Contentsquare est présent dans douze pays dans le monde. Les Achats y sont-ils représentés par l’un de vos collaborateurs ?
Au regard de nos enjeux, il était important de positionner les équipes achats au plus près des donneurs d’ordre et parties prenantes, situés, pour la grande majorité, en France
La majorité de l’équipe est basée au siège social à Paris, seul l’un des category manager est basé aux USA. Il n’en demeure pas moins que nous avons vocation à agir globalement, sur toutes nos géographies. Mais au regard de nos enjeux, il était bien plus important de positionner les équipes achats au plus près des donneurs d’ordre et parties prenantes, situés, pour la grande majorité, en France. C’est comme cela aussi que nous avons pu créer des relations de proximité particulièrement fortes.
Quel est le plan de marche de Contentsquare en matière de RSE et comment le déclinez-vous aux Achats ?
Contentsquare a accéléré sa démarche RSE en se dotant d’une équipe Impact fin 2021. Nous agissons sur quatre piliers : la protection de l’environnement ; la diversité, l’égalité et l’inclusion ; l’accessibilité numérique qui est portée par la Contentsquare Foundation ; et le “digital trust” ou protection de la vie privée en ligne.
Sur le volet environnemental, nous travaillons avec l’équipe Impact pour lancer un programme d’achats responsables qui sera intégré à notre première politique achats groupe. Par ailleurs, après avoir réalisé nos premiers bilans carbone, nous allons commencer à travailler avec EcoVadis sur notre base fournisseurs. L’objectif est de les aider à s’améliorer et d’en profiter également pour nous améliorer.
Quel bilan tirez-vous depuis votre entrée en fonction ?
Nous avons eu des retours très positifs et avons su créer une vraie collaboration avec nos clients internes et nos fournisseurs stratégiques. Nous sommes de plus en plus consultés dès la phase de réflexion des projets des équipes Métiers.
Nous travaillons beaucoup avec notre DSI, qui est l’un de nos principaux partenaires. Récemment, nous avons établi un software mapping pour l’accompagner dans le renforcement de la stratégie IT de l’entreprise. Nous sommes également impliqués sur un projet d’envergure sur le “future of work” pour lequel nous avons réalisé une analyse sur les taux d’occupation et les coûts de nos bureaux et ainsi mieux préparer nos investissements à court et moyen terme.
C’est très gratifiant d’être écoutés et de voir que nos recommandations sont prises en compte pour construire le modèle organisationnel de demain
Dans une entreprise comme Contentsquare, les acheteurs font bien plus que des achats. C’est très gratifiant d’être écoutés et de voir que nos recommandations sont prises en compte pour construire le modèle organisationnel de demain et en décliner ensuite une stratégie achats. Beaucoup de choses restent à construire, certains sujets n’ont pas encore été abordés. Sur certains, nous avançons doucement, tandis que sur d’autres, nous déployons déjà des stratégies d’achat. À cela s’ajoutent d’éventuelles fusions-acquisitions que le groupe pourrait opérer, comme c’est le cas avec Heap, entreprise américaine avec laquelle nous avons signé un accord définitif en vue de son acquisition il y a quelques semaines. Chaque acquisition augmente sensiblement notre périmètre.
Si nous nous reparlions dans un an, qu’aimeriez-vous avoir changé au sein de votre direction ?
Je dois avouer qu’il me plairait de renforcer l’équipe, afin d’adresser davantage d’opportunités. J’aimerais que nous avancions plus vite sur le sujet environnemental, qui ne constitue pour le moment qu’un de nos nombreux objectifs.