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Lacoste : « À travers le STPA, nous pouvons avoir accès à des entreprises compétitives »

Par Guillaume Trecan | Le | Ha inclusif

Julien Machenaud, directeur des achats indirects de Lacoste, déploie une feuille de route pour accroître progressivement sa part d’achats auprès du secteur du travail adapté et protégé. Il a été accompagné dans cette démarche par Hosmoz issu de la fusion du Gesat et d’Handeco.

Julien Machenaud, directeur des achats indirects. - © D.R.
Julien Machenaud, directeur des achats indirects. - © D.R.

Quel était votre degré de connaissance de vos achats auprès du secteur du travail protégé et adapté (STPA) avant d’engager le plan de progrès que vous venez de lancer sur ce sujet ?

Nous ne savions pas précisément dans quelle mesure nous étions engagés auprès du STPA. Nous avions connaissance de diverses initiatives locales et individuelles mais sans pouvoir les identifier, les mesurer, ni les consolider.

Nous souhaitons donc développer nos échanges avec des fournisseurs qui partagent des valeurs communes d’inclusion des personnes en situation de handicap

Qu’est-ce qui vous a incité à lancer ce programme ?

Ce programme s’inscrit dans la stratégie globale RSE de Lacoste, la « Durable Elégance », dont l’un des pilier est l’inclusion des personnes en situation handicap. Cette stratégie concerne toutes les dimensions de l’entreprise pour s’adresser aux équipes internes, aux clients, et bien sûr à nos fournisseurs. Il bénéficie d’une forte impulsion de notre direction générale, et est sponsorisé par un membre du comex. Il concerne tous les métiers dans une démarche 360°, dont les parties prenantes sont les RH, le Retail, l’Experience in store, l’IT, le Digital, les Services Généraux, ainsi que les Achats Indirects. En ce qui concerne les Achats, nous souhaitons donc développer nos échanges avec des fournisseurs qui partagent des valeurs communes d’inclusion des personnes en situation de handicap.

Comment avez-vous construit votre propre programme ?

En avril dernier, nous avons commencé par nous poser la question de l’état des lieux, d’une part et, d’autre part, de la meilleure approche pour construire une feuille de route réaliste. Nous nous sommes alors rapprochés d’Hosmoz - rencontré lors de l’Inclusiv’ Day - qui est la fusion du Gesat et d’Handeco. Nous nous sommes appuyés sur leurs compétences et leur méthodologie pour établir un premier diagnostic qui nous a permis d’identifier et de mettre en valeur les initiatives éparses au sein de l’entreprise de recours au STPA. Hosmoz nous a également permis de cibler, par une analyse détaillée de notre dépense, les catégories d’achats susceptibles d’être adressées par le STPA, en appliquant, pour chacune, un indice de complexité plus ou moins fort.

Notre ambition porte dans un premier temps sur une forte sensibilisation de l’ensemble des équipes pour démultiplier ces initiatives et accroitre notre recours au STPA

Avez-vous défini un montant cible d’achats auprès du STPA à atteindre ?

Nous avons travaillé initialement sur la dépense réalisée par nos entités en France, sur laquelle il est possible de caractériser les acteurs du STPA. Si de nombreuses initiatives individuelles et locales sont prises tous les ans, les montants engagés restent relativement modestes à ce stade. Nous avons en effet pu identifier une vingtaine d’Esat et EA avec lesquelles nous travaillons sur nos principaux sites de Troyes et de Paris. Notre ambition porte dans un premier temps sur une forte sensibilisation de l’ensemble des équipes pour démultiplier ces initiatives et accroitre notre recours au STPA. Une cible ambitieuse serait d’atteindre à terme 1 % de notre dépense confiée au STPA. Nous savons cependant que ce secteur reste très fragmenté et n’est pas toujours en capacité de prendre des marchés de taille significative ; cela pourrait être un frein dont il faut tenir compte pour atteindre notre ambition.

Quels leviers actionnez-vous en interne pour faire bouger les choses ?

Nous travaillons sur deux axes de développement bien segmentés. Le premier concerne les populations d’acheteurs qui ont été formées au sujet pour être en mesure d’intégrer dans nos appels d’offres dès que cela fait du sens, des acteurs du STPA, ou des clauses plus ou moins contraignantes incitant nos fournisseurs à y recourir sous les deux modalités envisageables : la cotraitance ou la sous-traitance. De cette manière, nous pourrons donner accès au STPA à nos marchés majeurs.

Nous considérons que ce sujet n’est pas de la seule responsabilité de la fonction achats

Le second axe consiste à embarquer l’ensemble des collaborateurs susceptibles d’engager des dépenses pour leur département et leur faciliter l’accès aux ESAT/EA en mettant à disposition un annuaire de services disponibles auprès du STPA et qui couvre un périmètre suffisamment large de prestations, par exemple, agences de communication, traiteurs, imprimeurs, co-packing, logistique… Nous voulons ainsi fédérer une communauté d’utilisateurs autour de cette offre de services qui pourra s’autoalimenter et s’élargir. Nous considérons en effet que ce sujet n’est pas de la seule responsabilité de la fonction achats, mais qu’il doit être porté par le plus grand nombre de collaborateurs au sein de l’entreprise ; cela doit devenir un réflexe pour chacun.

Nous restons réalistes et pragmatiques et envisageons de progresser pas à pas sur le sujet en mettant en avant des retours d’expérience et des exemples de collaborations réussies qui démontrent que les services rendus sont compétitifs, de qualité et faciles à mettre en œuvre. Nous avons en effet la conviction qu’à travers le secteur adapté et protégé, nous pouvons avoir accès à des entreprises compétitives en termes de coûts et de qualité. Nous ne ferons pas d’entorse à nos règles habituelles de sélection de nos fournisseurs. il ne s’agit pas d’un acte de philanthropie.

Avec quels outils pourrez-vous suivre la courbe de croissance que vous ambitionnez d’impulser ?

Nous envisageons dans un premier temps d’identifier les Esat et EA avec qui nous travaillions en direct par l’analyse régulières de notre base de données fournisseurs. Nous savons cependant qu’une partie non négligeable de ces prestations pourront passer via nos fournisseurs du secteur ordinaire à travers des contrats de sous-traitance. Dans ce cas, nous envisageons des outils de reporting basés sur du déclaratif d’activité avec ces derniers. Enfin, nous souhaitons favoriser et mettre en valeur les retours d’expérience en interne pour identifier, consolider et développer toutes les initiatives individuelles et locales portées par les collaborateurs.