Stratégie ha

Sanef : « Des tableaux de bord maison dans lesquels nous retraitons l’information de nos SI achat »

Par Guillaume Trecan | Le | Si ha

Raphaël Galligani, le directeur des achats du gestionnaire d’autoroutes Sanef expose son tableau de bord achats qui lui permet de piloter les différents KPI de performance de sa fonction achats. Il sera le grand témoin de l’atelier : « #Cockpit HA : Quel tableau de bord pour piloter la performance achats », qui se tiendra le 11 juin dans le cadre des HA Days digitalisation, à Deauville.

Raphaël Galligani, directeur des achats Sanef. - © D.R.
Raphaël Galligani, directeur des achats Sanef. - © D.R.

Comment la direction de l’entreprise envisage-t-elle la question de la mesure de la performance achats ?

En accord avec la direction de l’entreprise, je n’impose pas de KPI financier à mes équipes. La performance financière est indirectement induite par leurs autres objectifs. Nous mesurons le degré de concurrence sur nos appels d’offres. Nous l’exprimons en mesurant le nombre de réponses par rapport au nombre de fournisseurs consultés et le nombre de réponses par appel d’offres. Nous suivons également un KPI sur le nombre d’appels d’offres dans lesquels nous avons une action de négociation. Cet indicateur est limité à nos appels d’offres privés, qui représentent deux tiers de nos projets d’achats et un tiers de nos dépenses d’achats. Les contraintes réglementaires sur nos appels d’offres publics limitent en effet grandement la place laissée à la négociation.

Nos deux derniers indicateurs chiffrés mesurent la couverture contractuelle et la création de fournisseurs. Pour réduire les coûts administratifs de gestion de la base fournisseurs, nous avons pour objectif de faire passer sous la barre des 600 le nombre de nouveaux fournisseurs référencés chaque année sur une base d’environ 3 800 fournisseurs actifs. Mais, dans le même temps, nous voulons que plus de 20 % de ces 600 fournisseurs dépassent le seuil de 30 000 euros sur le plus important appel d’offres auquel ils participent chez nous. C’est en effet le seuil à partir duquel les acheteurs interviennent, leur travail pouvant notamment être de faire appel à des prospects pour challenger un panel fournisseur référencé.

Comment s’articulent ces deux objectifs de rationalisation de la base, d’une part, et de création de nouveaux fournisseurs, d’autre part ?

Ce sont des vases communicants. Le travail des acheteurs n’est pas de réduire la base fournisseurs mais d’aller en chercher des nouveaux. En revanche, nous avons, au sein de la direction des achats, des équipes administratives de gestion des flux d’achats et des approvisionneurs qui sensibilisent les directions opérationnelles, autonomes sur leurs achats inférieurs au seuil de 30 000 euros, notamment pour limiter la création de nouveaux fournisseurs sur des besoins déjà référencés. Notre équipe dédiée à la mesure de la performance et aux process achats construit également des outils et process pour réduire les volumes de création de fournisseurs en dessous du seuil.

Dans notre activité de gestionnaire et exploitant d’infrastructures d’autoroutes, le poids des achats représente 15 % du chiffre d’affaires et 20 % de l’Ebitda

Qu’est-ce qui a convaincu la direction de Sanef de ne pas se focaliser sur les gains sur achats ?

Le sujet n’a jamais été abordé ainsi, de sorte qu’il n’y a pas eu à convaincre la direction. La mesure des gains sur achats est biaisée par le fait que, dans un contexte économique et géopolitique incertain, nous, comme nos prestataires extérieurs en conseil et assistance, pouvons avoir beaucoup de difficultés à consolider des estimations en face de besoins multiples. Par ailleurs, il est parfois difficile de recaler une estimation sur des projets et des opérations dont les périmètres peuvent évoluer, y compris pendant des phases d’appel d’offres. Il y a aussi un certain nombre de domaines d’activité pour lesquels nos spécifications techniques sont particulières du fait de contraintes externes ou internes et peu de fournisseurs sont capables d’y répondre. Le levier mise en concurrence pour aller chercher des économies achats peut alors parfois être limité.

Enfin, dans notre activité de gestionnaire et exploitant d’infrastructures d’autoroutes, le poids des achats représente 15 % du chiffre d’affaires et 20 % de l’Ebitda. Il est donc plus facile de faire comprendre que la performance attendue des acheteurs ne se limite pas à des savings.

Suivez-vous aussi des éléments de performance achats non chiffrés ?

En effet, nous suivons le ratio de réclamations fournisseurs pendant l’exécution des prestations, pour lesquelles la cible fixée en négociation est atteinte. Nous mesurons aussi le pourcentage de projet d’appels d’offres que l’acheteur délègue, en comparaison du temps qu’il passe par ailleurs à ses fonctions de category manager comme la production de politiques achats par exemple sur les familles d’achats dont il est responsable.

Nous devons traiter plus de 700 appels d’offres par an avec seulement douze acheteurs. L’acheteur décide donc de son degré d’investissement, en accord avec son binôme de la direction opérationnelle. Sur des appels d’offres très standards où le prescripteur connait parfaitement son sujet et dont les enjeux financiers sont faibles, l’acheteur qui n’a pas de plus-value, délègue l’acte d’achats à son vis-à-vis opérationnel. A l’inverse, il y a des actes d’achats sur lesquels il faut absolument qu’il s’investisse.

Avec quels outils monitorez-vous ces indicateurs de performance ?

Ayant une équipe suffisamment importante et motivée, mais peu de budget d’investissement et de fonctionnement, nous avons construit des tableaux de bord maison dans lesquels nous retraitons l’information collectée depuis nos outils de SI achats : deux plateformes d’appels d’offres (SAP Ariba Sourcing pour nos appels d’offres privés et Achatpublic.com pour nos appels d’offres publics), notre ERP SAP et un outil de suivi des projets achats, Spend HQ (ex Per Angusta).

Au-delà du pilotage de la performance achats, vos tableaux de bord vous permettent-ils de piloter la performance fournisseurs comme un SRM ?

Nous avons construit un système de management des risques articulé autour de trois outils. Le premier est un outil maison constitué de tableaux Excel reportant les scorings de performance des fournisseurs interfacé avec notre outil Spend HQ de suivi des appels d’offres et contrathèque. Nous avons attaché aux alertes automatiques de préavis de fin de contrat un masque Excel que les prescripteurs doivent remplir et qui est ensuite réinjecté dans l’outil pour alimenter des reportings, toujours sous Excel. Le second, Go Supply, est un outil de scoring des risques fournisseurs et de classification selon leur criticité, utilisé par notre actionnaire Abertis. Enfin, nous avons un outil de cartographie des risques et plans d’action associés par catégorie d’achat. Les résultats de cette cartographie sont intégrés dans la production des politiques achats et les plans d’actions associés sont suivis au niveau prescripteurs, acheteurs et directeurs.