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Lidl : « Depuis avril 2025, nous avons basculé vers le 100 % électrique »


Ousmane Mbodje, responsable de pôle mobilité achats indirects chez Lidl France détaille la mutation de sa flotte de véhicule de fonction orientée vers le 100 % électrique. Une révolution préparée de longue pour ne pas braquer les collaborateurs et préparée par d’importants investissements dans les infrastructures de recharge. Il sera grand témoin sur l’atelier « Flottes : embarquer les utilisateurs dans une ère de transition », lors des HA Days Travel Mobilité les 16 et 17 octobre à Deauville.

Ousmane Mbodje,  - © D.R.
Ousmane Mbodje, - © D.R.

A quand remonte le déploiement de votre programme de verdissement de votre flotte ?

En 2022, nous avons commencé par ne plus recourir à des véhicules diesel et n’introduire que des véhicules hybrides et essence. Nous avons alors entrepris d’électrifier tous nos sites : les sièges, les entrepôts et les supermarchés. L’électrification des parkings de nos magasins avaient commencé bien avant 2022 et à ce jour plus de 4 000 bornes y sont implantées. Plus de 1 500 bornes équipent aujourd’hui nos entrepôts et sièges dont 267 au siège de Châtenay Malabry.

Accompagner le collaborateur dans cette transition commence par le fait d’adapter les infrastructures

Les véhicules électriques sont en passe de représenter la totalité de la flotte de véhicules de fonction de Lidl. Comment avez-vous préparé cette transition ?

Accompagner le collaborateur dans cette transition commence par le fait d’adapter les infrastructures. Le collaborateur doit être assuré qu’il pourra charger son véhicule sur les sites où il travaille, à son domicile et en itinérance. En itinérance, nous les avons équipés de cartes et d’une application pour les aider à recharger leur véhicule partout. Sur site, l’installation de bornes demande de maîtriser un minimum de paramètres techniques. Il est donc préférable d’être accompagné par des acteurs compétents de ce marché, notamment pour la dimension IRVE (Infrastructure de recharge de véhicules électriques), mais aussi pour vérifier que l’installation électrique du site dispose de suffisamment de puissance pour alimenter des bornes.

A domicile, il existe deux possibilités : faire poser des bornes ou confier au collaborateur un câble connecté. Nous privilégions désormais cette deuxième solution qui évite d’avoir à intervenir au domicile des collaborateurs, notamment en cas de problème technique ou pour récupérer la borne s’ils viennent à quitter l’entreprise ou pour désinstaller et réinstaller en cas de déménagement. La recharge à domicile est un plus car tout le monde n’a pas cette possibilité, raison pour laquelle l’investissement doit se faire en priorité sur les lieux de travail.

Quels choix de véhicules avez-vous faits ?

C’est la deuxième étape clé pour réussir cette transition. Nous avons la chance d’avoir référencé des modèles et des marques qui répondent aux différents besoins en termes de confort et d’autonomie. Cela permet de rassurer fortement les collaborateurs.

Nous avons organisé des séances d’informations et mis à disposition des documents complémentaires avec beaucoup de détails sur l’utilisation d’un véhicule électrique mais également la Car Policy leur permettant ainsi d’avoir des informations sur les véhicules disponibles en indiquant pour chaque modèle l’autonomie ainsi que le coût de l’avantage en nature.

Le coût des consommations de carburant d’un véhicule thermique est deux à trois fois supérieur à celui d’un véhicule électrique

Comment incluez-vous dans le TCO des véhicules électriques ces investissements importants ?

Le coût d’équipement varie beaucoup d’un site à l’autre. Certains sites n’ont pas la puissance électrique suffisante et nécessitent l’installation d’un PDL (point de livraison) dédié aux bornes avec des délais de raccordement qui peuvent être assez longs. D’autres impliquent des travaux de terrassement pour tirer des câbles pouvant entrainer des coûts importants. Mais surtout, le coût des consommations de carburant d’un véhicule thermique est deux à trois fois supérieur à celui d’un véhicule électrique. Cet écart est encore plus important si la charge se fait sur le lieu de travail ou à domicile car le coût du kWh étant plus intéressant que sur les bornes publiques. Avec une flotte de véhicules importante, cet investissement peut être amorti très rapidement, raison pour laquelle nous privilégions les recharges sur nos sites ou à domicile et de façon exceptionnelle en itinérance.

Avez-vous une idée du niveau de satisfaction des utilisateurs par rapport à ces véhicules ?

En 2022 nous avions imposé le passage à l’hybride pour les sédentaires, les itinérants conservant des motorisations essence. En 2023, nous avons introduit des véhicules électriques laissant le choix aux sédentaires entre une motorisation hybride ou 100 % électrique. Depuis avril 2025, nous avons basculé vers le 100 % électrique. Avant cette transition vers le 100 % électrique, seule quelques conducteurs étaient passées à l’électrique. Ces conducteurs précurseurs étaient présents lors des séances d’information et ont volontiers joué le rôle d’ambassadeur de l’électrique et ont montré leur satisfaction et adhésion au véhicule électrique.

Malgré le manque de recul, avez-vous tous les éléments pour mesurer l’équation économique du véhicule électrique ?

Le plus évident est l’économie sur les consommations énergétiques entre électrique et thermique. La fiscalité est également à prendre en compte, en particulier le décret sur l’avantage en nature pour les véhicules éco-scorés qui bénéficient aussi bien au salarié qu’à l’entreprise. Les CEE (certificat d’économie d’énergie) pour l’acquisition ou la location de véhicule électrique permettent également de minorer les coûts. Cela dit, il est crucial de bien connaître la réglementation et de suivre son évolution afin d’adapter sa stratégie.

Le crédit mobilité ou une prime peuvent être des alternatives

Quelles autres transitions devez-vous gérer en tant que gestionnaire de flotte ?

Proposer des alternatives au véhicule pour ceux qui sont éligibles mais qui n’ont pas le permis ou qui préfèrent un autre mode de mobilité que la voiture. Le crédit mobilité ou une prime peuvent être des alternatives. Le crédit mobilité est fléché uniquement sur des moyens de transport tels que taxi, VTC, avions, train, achat de vélo et équipement de sécurité…etc alors que la prime peut être utilisée comme un supplément de salaire. Les mobilités douces comme le vélo, scooter électrique, trottinette électrique sont également des alternatives avec tout de même une réserve du fait du risque accru d’accident pour les usagers de deux roues.

Voyez-vous beaucoup d’innovations apparaître dans le secteur de l’offre de mobilité ?

Beaucoup de nouveaux acteurs agiles et flexibles viennent bousculer le marché. Je pense notamment au marché de l’accès à l’énergie, avec des gestionnaires de bornes, ou encore des sociétés de maintenance prédictive capables de détecter des anomalies à distance. Des entreprises créent des applications de suivi des consommations et des kilométrages qui permettent de différencier les usages professionnels et privés. D’autres applications dédiées aux collaborateurs peuvent aussi être utilisées pour promouvoir les axes de la politique de flottes de l’entreprise. Mon quotidien de mobility manager en charge du fleet et du travel est extrêmement riche et stimulant avec beaucoup d’évolutions techniques et fiscales qui nous pousse à être vigilant, proactif et toujours prêt à accompagner le changement.

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