Stratégie ha

Club Planète Sourcing : La simplification, mission ou obligation pour les Achats ?

Par Mehdi Arhab | Le | Direction ha

Le cinquième Club Planète Sourcing de la saison 2023 a vu une vingtaine de directeurs achats grands groupes évoquer le sujet de la simplification. Une question essentielle, mais pas toujours très simple à appréhender pour les Achats.

Club Planète Sourcing : La simplification, mission ou obligation pour les Achats ?
Club Planète Sourcing : La simplification, mission ou obligation pour les Achats ?

Une mission ou une obligation ? Le sujet de la simplification a déchaîné les débats du dernier Club Planète Sourcing du premier semestre 2023. Pour Maurice Hamoir, directeur business developement de l’éditeur Oalia, sponsor de la soirée, la réponse est toute trouvée. «  La simplification démarre par la fonction et non par l’outil. Simplifier n’est d’ailleurs pas une mission pour les Achats, mais bien une obligation ». À ses yeux, les outils ne sont d’ailleurs qu’un vecteur de la simplification.  D’ailleurs, standardiser, simplifier, chasser la non-qualité restent des leviers de tout premier choix des Achats pour dégager des économies, en particulier par temps d’inflation. De quelle manière ? En questionnant le besoin de leurs clients internes. De la sorte, les acheteurs, qui jouissent d’une vision à 360 degrés de leur entreprise, peuvent apporter de la clarté et de l’efficacité dans l‘organisation industrielle et ses process. 

En changeant la manière d’exprimer le besoin, le potentiel d’optimisation est énorme et cela se traduit par de la performance

L’une des meilleures manières de simplifier l’acte d’achat est en effet de challenger le besoin ; le plus important étant que la prescription ne doit pas enfermer et rester fonctionnelle pour permettre au fournisseur de proposer ce qu’il a en magasin. « Prescrire de manière complexe est générateur de coûts. Il faut montrer par des faits au client interne ce qu’il a à gagner en prescrivant plus simplement », commente l’une des invités. « En changeant la manière d’exprimer le besoin, le potentiel d’optimisation est énorme et cela se traduit par de la performance », acquiesce Julien Barthélémy de SAP, sponsor aussi de la soirée. « Challenger permet de chercher de la standardisation et sortir de situations de potentiel monopole », poursuit-il.

« Des architectes de l’efficience »

Simplifier n’est pas une mission aux Achats, c’est un moyen d’être performan

Toutefois, le sujet de la simplification n’est en rien simple. Et simplifier n’a rien d’évident, d’autant plus dans de grands groupes, qui « sont complexes par nature », rappelle l’une des convives, directrice achats d’un grand groupe industriel français. Cette dernière a d’ailleurs placé le sujet de l’efficience au cœur de sa roadmap. L’efficience, justement, est un sujet d’achat. « Simplifier n’est pas une mission aux Achats, c’est un moyen d’être performant. Nous nous devons d’être performants sur nos processus, car en tant qu’acheteurs, nous sommes des architectes de l’efficience », assène l’un des invités. Reste toutefois à se poser une question : de quelle manière appréhender le sujet de la simplification ? Faut-il l’envisager davantage vis-à-vis du prescripteur que de l’organisation achats en elle-même ? « Les Achats sont censés déjà avoir travaillé sur leurs propres processus, de manière à les rendre simples », tranche un CPO présent. 

Les process achats, outils qui ne doivent plus être perçus comme un frein

Bien souvent, lorsqu’un prescripteur en vient à court-circuiter les Achats, il objecte que son collègue aurait ralenti le processus. Un poncif qui agace, mais qui doit tout de même être entendu. Dès lors, pour augmenter son taux de couverture, la direction des achats doit veiller à rendre le plus léger possible le process achats, également les workflows de validation pour améliorer le time-to-market. Le plus important pour les Achats étant de proportionner leurs actions à l’enjeu de l’acte d’achat.

Pour les petits montants, beaucoup décident de s’impliquer très faiblement, voire de déléguer aux prescripteurs. « Je m’appuie pour ma part sur une culture très décentralisée, avec une délégation totale aux métiers selon des règles fixées en amont », explique la direction des achats d’une compagnie d’assurance. Avec l’idée derrière de permettre, comme beaucoup de ses pairs, de permettre à ses équipes de se recentrer sur leur cœur de métier et de se positionner en amont, plutôt que de passer leur temps à gérer des tâches administratives chronophages et sans grand intérêt intellectuel.

Des outils pour simplifier, mais somme toute complexe dans le fond

Pour lutter contre ce procès en complexité, les Achats se démènent et tentent de trouver des solutions. Ainsi, de plus en plus de services achats recourent à des outils digitaux. Ceux-ci, à destination des clients internes, doivent être simples et plus intuitifs. Un sujet d’ergonomie dans le fond, d’expérience utilisateur, mais pas seulement en réalité. Et pour cause, pour rester efficace et permettre le même degré de contrôle, de reporting, d’intégration dans les ERP de l’entreprise, ces nouveaux outils e-achat doivent, au fond, être très pointus.

Si les outils sont de plus en plus sophistiqués, c’est aussi parce qu’ils doivent être plus intelligents par eux-mêmes.

Et cette simplicité en surface implique une grande complexité dans le traitement des datas. Un constat partagé par bon nombre de convives. « Si les outils sont de plus en plus sophistiqués, c’est aussi parce qu’ils doivent être plus intelligents par eux-mêmes. Ils gèrent de plus en plus de complexité et doivent en faire beaucoup plus car nous avons besoin de nous simplifier la vie et notre tâche », rappelle la directrice des achats indirects groupe d’un mastodonte de la grande distribution. Pour s’éviter des nœuds au cerveau et un déploiement douloureux de son outil sur toutes ses géographies, elle s’est contentée du standard de l’outil. « Nous avons fait en sorte de s’adapter à l’outil et non l’inverse, car il est bien trop difficile d’épouser les contours de tous nos besoins », a-t-elle expliqué. « Nous sommes davantage exigeants et manipulons de plus en plus de datas, aussi bien sur la partie RSE, que risque entre autres. Les tâches sont plus nombreuses, de fait les outils sont plus complexes », complète quant à elle une de ses pairs.

Un environnement complexe aussi du point de vue règlementaire

Le cadre réglementaire, de plus en plus dense, est également à prendre en considération par les acheteurs. Entre la déclaration développement durable des entreprises, le devoir de vigilance … les Achats ne savent plus où donner de la tête. De même, la masse d’informations demandées aux fournisseurs ne cesse de s’accroître, au risque de peser sur la relation business et de dissuader de nouveaux entrants, mais aussi sur « la relation avec le prescripteur », pointe l’un des convives. Comment, dans ce contexte, les acheteurs peuvent-ils conserver la maîtrise du risque sans alourdir la relation fournisseur-prescripteur ? Vaste question.