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Alstef : « Notre service est structuré autour de la notion d’anticipation »

Par Mehdi Arhab | Le | Direction ha

Sollicité en 2018 pour créer la direction des Achats d’Alstef Group, Jean Artur a fignolé un service robuste et une stratégie qui renforce la croissance du groupe. Une approche qui passe notamment par une montée du catégorie management et une coopération de tous les instants avec les autres lignes de métier, à commencer par la direction commerciale.

Jean Artur, directeur des Achats d’Alstef Group - © D.R.
Jean Artur, directeur des Achats d’Alstef Group - © D.R.

De quelle manière s’agence votre organisation achats ?

Alstef Group est la réunion de deux PMI, qui ont engendré une ETI. Celle-ci conçoit, intègre et maintient des solutions automatisées clés en main pour les marchés de l’intralogistique, de l’aéroportuaire et du tri colis. Présent dans une dizaine de pays et avec des systèmes installés sur les cinq continents, Alstef Group emploie près de 800 collaborateurs, avec une dernière acquisition en Nouvelle Zélande. J’ai été sollicité en septembre 2018 pour créer la direction des Achats du groupe, afin de passer d’un mode achats de conséquence à une stratégie d’achats, avec une organisation et une politique achats qui découlent des ambitions du groupe. Aujourd’hui, 14 personnes, au profil expérimenté, me sont hiérarchiquement rattachées et administrent chaque année 85 millions d’euros d’achats ; 58 % de notre chiffre d’affaires est d’ailleurs composé par ce qui est acheté.

Notre politique achats s’articule autour d’une stratégie par segments d’achats et fournisseurs stratégiques. Pour ce qui est de notre organisation, celle-ci peut se définir ainsi : catégories marchés, géographie et clients internes. Ces trois points constituent une mécanique qui nous offre la meilleure des stabilités. Nous avons bâti une équipe intégrée avec du catégorie management, avec des équipes par plaques géographiques, qui mettent en œuvre notre stratégie dans les filiales concernées. Nous avons un pôle en Nouvelle-Zélande, un pôle en Inde, un pôle en Bretagne et un dernier à Orléans, qui pour ce dernier est le siège du groupe. Chacun des acheteurs détient un portefeuille, en rapport avec la typologie de son marché, à savoir l’intralogistique ou l’aéroportuaire. Nous comptons également au sein de notre effectif un responsable performance qualité achats fournisseurs, qui réalise des audits, des évaluations et établit les KPI de suivi quotidien en termes d’amélioration continue. 

Qu’achetez-vous ?

Notre activité est définie par des achats techniques, de matériels et de prestations. Nos principales commodités sont relatives à 38 % à des produits et prestations entièrement confiés à un tiers (PECT), de la sous-traitance mécanique et électrique à 27 % ; le reste se décomposant en achats d’armoires électriques, des achats de composants électriques et électroniques, des achats de matériels sur plans et des achats de frais de fonctionnement (flotte automobile, voyages, frais généraux, etc). 

Quel rôle vos équipes jouent-elles ?

Les missions des acheteurs sont de plusieurs ordres. Étant en mode projet, les acheteurs doivent se placer au début du processus. Nous comptons pour cela ce que nous appelons des AVP, des acheteurs avant-projet, positionnés très en amont donc, pour mieux permettre à notre entreprise de répondre aux appels d’offres de nos potentiels clients. Il est souvent rappelé que 80 % du prix d’un produit est fait dès sa conception, raison pour laquelle je souhaitais placer les Achats le plus en amont possible. Lorsque nous obtenons un marché, un responsable d’affaires est désigné et sur ce, il s’adjoint les services de ce que nous appelons des RTA, des responsables techniques d’achats.

Ceux-ci sont nommés par mes soins afin de consolider en aval tous les besoins et constituent les interlocuteurs privilégiés du responsable d’affaires. Eux aussi opèrent en mode projet avec le responsable d’affaires et selon les besoins en matière d’achats, distribuent le travail aux différents acheteurs, lesquels sont aussi RTA d’autres affaires et category manager, menant une politique achats autour du sourcing, de la contractualisation sur des contrats cadres et des opérations de massification. Sans oublier l’appui de la Supply Chain, avec un seul mot d’ordre : créer de la richesse. 

Quels sont les objectifs prioritaires fixés à la direction des achats ?

Ils se déclinent en trois points : financiers, humains et sécuritaires. Sur le plan financier, nous intervenons sur une très grande majorité des achats, y compris les achats hors production et de frais de fonctionnement. Notre taux de couverture est aujourd’hui de 90 %, ce qui nous permet entre autres de générer des gains achats, d’améliorer l‘Ebitda et de créer de la valeur. Sur ce point, c’est en faisant monter en compétence nos équipes et en les faisant grandir que nous y parvenons. La richesse vient aussi par les Hommes. 

Il faut nourrir intellectuellement nos collaborateurs pour renforcer leur capacité à bien traiter les sujets

Cela passe également par de la formation sur des sujets précis afférents à de la haute valeur d’achats. Il faut nourrir intellectuellement nos collaborateurs pour renforcer leur capacité à bien traiter les sujets. Le point de vue sécuritaire est lié aux processus, méthodes, documents supports associés et au contractuel qui n’existaient pas avant mon arrivée.

Quels leviers privilégiez-vous pour tenir face à l’inflation ?

Notre service est structuré autour de la notion d’anticipation. Nous achetons beaucoup de racks, des supports d’entreposage en métal et la hausse des prix des aciers fin 2020 a été une première alerte. Nous sommes passés d’un prix moyen de l’acier sur un indice à 450 à des indices qui sont montés à 1200 et même 1650 au déclenchement de la guerre en Ukraine. Nous ne sommes pas en reste sur la partie matériel électrique, avec les pénuries de composants électroniques, qui provoquent des hausses de prix considérables et l’allongement des délais de livraison.

Nous parvenons pour partie à limiter les hausses et à sécuriser nos approvisionnements, grâce principalement à notre participation à la prise d’affaires et à sa vie

Sur certains articles, nous devons attendre jusqu’à un an pour être livrés, quand il ne fallait attendre que huit semaines il y a encore quelques années. Si les temps sont difficiles, nous parvenons pour partie à limiter les hausses et à sécuriser nos approvisionnements, grâce principalement à notre participation à la prise d’affaires et à sa vie. Les Achats ont développé un fort prisme de business partner avec les directions commerciales. Dans ce cadre, des formules de révision sont établies en permanence au niveau de la vente, basées sur les indices posés par la direction des achats. Nous avons également travaillé avec la direction juridique pour aménager les conditions générales de ventes, afin de nous sécuriser à la vente à l’aune de ce que nous subissons à l’achat. Avec le renforcement de notre stratégie par catégories, nous avons monté des contrats cadres avant la crise, pour lesquels nous nous sommes engagés sur des hauteurs de volume avec des stocks de consignation.

Cela nous a permis de sécuriser les prix sur une durée donnée, trois ans le plus souvent et de constituer des stocks, en interne d’une part et chez les fournisseurs d’autre part pour la réservation de matières et de produits semi-finis. Nos bureaux d’études sont également sollicités pour définir au mieux les besoins, afin d’imaginer des approvisionnements prévisionnels, que nous complétons ensuite par des commandes ponctuelles de fin d’affaires. Jusqu’à alors, nous nous sommes bien débrouillés pour ne pas vivre dans la difficulté.

Quelle place occupe le sujet de la digitalisation ?

Nous avons mis en place un ERP sur notre usine à Rennes et nous disposons d’un SI achats qui nous permet de sécuriser nos opérations et de garantir des volumes. Cet outil offre bien plus de performance à l’acte d’achat et sa sécurisation. Notre pôle en Nouvelle-Zélande possède son propre outil ; le souci étant que ces trois solutions sont différentes. De ce fait, nous avons décidé de monter une BI de façon à extraire tous les éléments nécessaires pour assurer notre bon fonctionnement de ce point de vue.

Quelles ambitions portez-vous en matière d’achats responsables ?

La RSE va davantage entrer en compte dans notre feuille de route et est vouée à être de plus en plus prédominante à l’avenir. Cela devient un des critères de choix de nos clients dans la sélection. De plus, cela nous permet de capter certaines innovations fournisseurs sur certaines pièces. Certains de nos partenaires sont très volontaires et nous pouvons nous en réjouir.

Nous mettons en place des actions pour diminuer nos flux de transport afin de réduire notre empreinte carbone

Ce sont des actions que nous valorisons et sublimons au sein de l’entreprise, par le biais de différents plans de communication. Nous avons par exemple travaillé pour optimiser nos emballages en bois, de façon qu’ils soient plus respectueux d’un point de vue environnemental et réutilisables. Nous mettons désormais en place des actions pour diminuer nos flux de transport afin de réduire notre empreinte carbone.