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Club Planète Sourcing : quelques pistes pour aligner RSE et création de valeur


Lors d’un atelier réunissant plusieurs directeurs achats, la discussion a porté sur la place croissante de la RSE dans la stratégie des entreprises. Si tous reconnaissent son rôle structurant, beaucoup soulignent la difficulté d’en faire un véritable critère de décision, faute d’outils, de maturité ou de gouvernance claire. Extraits d’un débat franc et sans langue de bois sur un sujet qui redéfinit les contours du métier d’acheteur.

Club Planète Sourcing : quelques pistes pour aligner RSE et création de valeur
Club Planète Sourcing : quelques pistes pour aligner RSE et création de valeur

« Dans mon esprit, il ne devrait même pas y avoir de direction RSE, sauf pour la compliance. La RSE doit être intégrée dans tous les cycles business de l’entreprise. » Le ton est donné. Pour ce directeur achats d’une ETI industrielle vendant en BtoB qui a pris un cran d’avance sur la constitution d’un écosystème de fournisseurs responsables, la RSE doit infuser la stratégie et irriguer les décisions achats à tous les niveaux.

Les Achats mobilisent toutes les énergies

La directrice achats d’une autre ETI française qui compte parmi ses clients de grands groupes très exigeants en matière de RSE abonde dans son sens : « L’acheteur d’aujourd’hui, c’est un chef de projet qui fédère un écosystème : les prescripteurs, la RSE, les métiers internes et les fournisseurs. Si chacun travaille dans son coin, on ne fera pas bouger les lignes. »

Tant que la RSE ne sera pas perçue comme un avantage compétitif, elle restera à la marge

Une vision semble-t-il avant-gardiste au regard de la réalité plus centrée sur la survie économique que vive d’autres confrères chez qui cette intégration reste inégale. « Chez nous, les objectifs achats responsables ont du mal à se diffuser. Tant que la RSE ne sera pas perçue comme un avantage compétitif, elle restera à la marge. Le jour où elle fera gagner des marchés, elle deviendra du business as usual. »

On vit dans une économie de chiffres, or il est presque impossible de monétariser le carbone ou le social

Les freins sont nombreux : gouvernance éclatée, manque de formation, indicateurs inadaptés. « On nous demande d’intégrer des critères RSE dans nos appels d’offres, mais comment comparer objectivement deux offres, l’une meilleure sur le CO₂ et l’autre sur le prix ? On vit dans une économie de chiffres, or il est presque impossible de monétariser le carbone ou le social. »

Pour d’autres, la clé réside dans le partenariat à long terme : « Nous travaillons depuis 30 ans avec certains fournisseurs. Ce sont des partenaires qui partagent nos valeurs. La RSE n’est donc pas un critère de plus : elle fait partie de notre ADN commun. »

On investit beaucoup pour que chaque vendeur sache expliquer nos engagements

Impossible d’avancer sans les clients

Les acheteurs soulignent aussi l’importance de la pédagogie auprès des clients finaux. « Les consommateurs se disent tous sensibles à la RSE, mais dès qu’ils passent à l’achat, le premier, le deuxième et le troisième critère restent le prix. » D’où la nécessité de former les équipes de vente : « Il faut homogénéiser le discours dans nos réseaux. On investit beaucoup pour que chaque vendeur sache expliquer nos engagements. »

Chaque contrainte environnementale pousse à inventer de nouvelles solutions

La RSE, levier d’innovation ? Tous s’accordent sur ce point. « Le besoin est le père de l’innovation », rappelle un intervenant. « Chaque contrainte environnementale pousse à inventer de nouvelles solutions : du transport multimodal à l’éco-conception, c’est une source de créativité. » Un autre témoigne : « Nos fournisseurs nous disent :  »Vous nous avez fait bouger.«  C’est là que la RSE crée de la valeur : quand elle transforme réellement les pratiques. »

Il faut travailler sur des cas concrets, mesurer les résultats, former les partenaires

Mais l’innovation doit rester pragmatique. « Ce n’est pas sur le papier que la RSE progresse. Il faut travailler sur des cas concrets, mesurer les résultats, former les partenaires, y compris les ESAT ou entreprises adaptées. La maturité collective se construit pas à pas. »

Les responsables RSE apportent la vision réglementaire et stratégique, les Achats, l’opérationnel

Pour finir sur une note positive, le tour de table est unanime sur un point au moins : la coopération entre direction des Achats et direction RSE fait consensus. « Nous travaillons main dans la main », explique un participant. « Les responsables RSE apportent la vision réglementaire et stratégique, les Achats, l’opérationnel. Ensemble, nous co-construisons des solutions qui ont un vrai impact. » Un fournisseur complète : « Depuis deux ans, les directions achats nous orientent vers les directions RSE. Nous développons ensemble des produits que nous n’aurions jamais imaginés seuls. »